Culture à l’hôpital

Historique du partenariat et du projet :

A l’initiative de l’équipe soignante du pôle Paris 11 des Hôpitaux de Saint Maurice soucieuse de proposer à leurs patients une ouverture à la culture et à la cité, l’élaboration d’un projet artistique a été proposée à la compagnie Les Apicoles et son metteur en scène Bruno Bernardin.

  

Cet atelier théâtre vise à mettre en jeu le corps et la voix de ses participants en permettant des découvertes basées sur le plaisir, les valeurs esthétiques et symboliques. Il pousse les patients qui ne sont plus perçus comme tels mais comme des comédiens, au même titre que les soignants qui joueront avec eux, à s’investir personnellement tout en s’impliquant dans un projet collectif.
Il prévoit de développer l’imaginaire et les capacités de création par la pratique d’exercices et d’improvisations, tout en différenciant l’espace imaginaire de l’espace du réel.
Il favorise également la mise à distance par le jeu théâtral des différents états émotionnels et sollicite les fonctions cognitives (mémorisation, concentration) à travers l’apprentissage de textes et l’écoute des autres.
Cet atelier permet aussi la valorisation de l’individu afin d’affirmer le sentiment de confiance en soi.
Ce projet collectif entraîne des échanges inter-personnels avec le groupe, le public, l’entourage… qui contribuent à mobiliser des ressources et des élans de vie.
Il participe de plus à un travail de lien et d’échanges au sein de l’hôpital car il prévoit la participation d’autres ateliers tel que les ateliers « couture » pour la confection des costumes et des décors, « cuisine » pour la préparation de collations lors de la répétition générale et d’un buffet après la représentation, « court métrage » et « photographie » pour la création d’un documentaire et d’une exposition photo retraçant cette aventure.
Enfin, il représente un mouvement d’ouverture vers l’extérieur qui favorise l’intégration dans la cité, car les répétitions ont lieu en dehors de l’hôpital dans une salle mise à disposition par la mairie du 11ème ou au Théâtre municipal du Val d’Osne de Saint Maurice. Ces répétitions donneront lieu à une représentation finale.

ATELIER 2018 : Correspondances

Pour cette troisième année consécutive, notre nouveau projet prolonge, affine et approfondit les deux précédents. Nous souhaitons conserver nos thématiques esthétiques , nos prises de paroles artistiques et interactives, la transversalité des travaux professionnels et amateurs et toujours rendre nos participants créatifs, au cœur même du projet. Un projet collectif où chacun est acteur du processus.

Les initiations au jeu masqué et clownesque ont permis à chacun de s’extérioriser tout en étant sécurisé. Le nez ou le masque comme une protection qui libère la parole, le corps ou les émotions, qui permet de se livrer sans se dévoiler tout à fait.

Nous allons travailler cette saison autour de la peinture, à visage découvert. Chercher dans les tableaux par leurs protagonistes ou leur paysage ce qui fait écho chez les participants et ce qu’ils souhaitent en raconter. Cela entraînera ou une écriture propre ou un choix de texte qui se théâtralisera : en correspondance.

Nous avons observé leur enthousiasme dans la découverte d’une discipline artistique inconnue et dans le fait de sortir des institutions hospitalières. C’est pourquoi, pour construire notre projet, plusieurs sorties au musée sont prévues. D’autres sorties théâtrales seront organisées avec un choix adéquat de mises en scène.

A nouveau, chaque participant sera invité à découvrir le travail de la compagnie : ses créations, ses expositions, ses implantations. Ce lien privilégié fait prendre sens à leur propre investissement , contribue au partage des savoirs et rend convivial le travail commun. Tout comme les patients et les soignants quittent leur statut pendant l’atelier, il en est de même lorsque le metteur en scène ou la photographe s’exposent sur scène ou en galerie.

Correspondance est un projet mêlant donc le théâtre à la peinture et à l’écriture. L’objectif est la réalisation d’un spectacle en fin d’année. Le processus de ce spectacle est de faire des extensions à l’image figée d’une toile. Nous allons incarner ces personnages peints ou intégrer des personnages inconnus dans des toiles non personnifiées. Leur créer une histoire, leur donner une situation qui deviendra saynète qui par succession se transformera en un tout : un spectacle. Les acteurs devront se retrouver à un moment dans la même position que les personnages en peinture, ceux-ci apparaîtront par vidéo lors de la représentation comme un moment suspendu.  Les acteurs pourront également habiter un paysage peint sans présence humaine.

Deux phases de travail sont envisagées avec  le même plateau relié par les patients et les soignants qui quittent ou leur fonction ou leur statut pour partager une seule et même scène, un seul et même travail.

La première sera l’approche de divers peintres, travail mené jusqu’à l’été. Par un travail d’improvisation, nous allons donner vie à ces personnages. Faire des allées et venues entre l’image et la scène. Susciter également la créativité des participants, trouver l’écho qui résonne chez eux : par plusieurs médias ou façons de s’exprimer possibles.  (Le témoignage, le chant, la lecture d’une œuvre existante ou par leur propre écriture théâtrale) . L’apport d’images en répétition ou la découverte d’un peintre dans une exposition sera le terreau de notre travail. Riche de tous ces courants, chacun trouvera son espace et pourra trouver matière à imaginer et à s’exprimer, des thématiques s’en dégageront.

La deuxième phase sera celle de l’élaboration même du spectacle présenté en public en décembre 2018. Les choix des peintures étant acquis, nous travaillerons sur l’écriture des saynètes, à la recherche de textes théâtraux ou même d’extraits de film. De nombreux réalisateurs- scénaristes s’étant très largement inspiré de la peinture, Renoir, Pialat ou Bruno Dumont par exemple. Ces textes seront travaillés et répétés, mis en espace créant une dramaturgie singulière à notre objet artistique.

L’objectif principal est de montrer la correspondance de ces arts et de trouver une source d’inspiration à nos participants. Non pas de les perdre en multipliant les médias.

ATELIER 2017 : Démasquez-moi, ou le théâtre masqué m’ouvre ses portes

Notre nouveau projet est une extension de celui de l’an passé intitulé « initiation à l’art du clown ». Le nez de clown représentant le plus petit masque qu’il soit, nous étendrons notre découverte autour du théâtre masqué et de ses codes. L’ensemble du travail vise toujours à mettre en jeu le corps, l’esprit et le cœur de ses participants en permettant des découvertes basées sur le plaisir, les valeurs esthétiques et symboliques… Sur le plateau, tous les participants sont dirigés de la même façon et dans la même voie. Il en résulte un projet collectif associant sur un même pied d’égalité les patients et les soignants qui deviennent des véritables partenaires de scène, encadrés par un duo d’artiste, metteur en scène – comédien et plasticien.

Il est conçu dans une vision globale du projet artistique de la compagnie car ce même duo d’artistes créera lors de la saison et dans un temps annexe une adaptation d’un récit de Laurent Gaudé « Sang négrier » en théâtre masqué. L’objectif est d’associer les deux créations, l’amateure et la professionnelle, à l’image d’une école dite d’acteur-spectateur. Nos participants auront l’occasion de suivre les différentes phases de création de « Sang négrier » par des séances de répétitions ouvertes jusqu’à la première. Ces répétitions seront pour eux une extension de leur travail : un moment d’observation où se concrétiseront à leur regard et par nos échanges toutes les indications ou les règles qui leur ont été apportées. Faire que le travail prenne sens par ces rendez-vous.
En parallèle, à toutes les vertus d’une activité artistique (valorisation de l’individu, confiance en soi, mise à distance par le jeu théâtral des états émotionnels, sollicitation des fonctions cognitives), l’objectif de notre projet est de remettre nos participants dans une démarche de construction au sens propre comme au sens figuré. Au sens propre car ce sont eux qui façonneront leurs propres masques grâce à la plasticienne, facteur de masque, projetant eux-mêmes leurs personnages ; et au sens figuré, car leur ouvrir les portes de notre propre travail c’est les stimuler sur le leur.
De la naissance de ces masques naîtront les textes qui nous mettrons en scène. Lazzi italien, textes antiques ou contemporains, si, après leur confection, les masques sont hors du cadre de la commedia dell’arte. Le choix des textes et son montage donnera le sens du spectacle. Nous ne voulons pas imposer ces textes en amont afin de ne pas restreindre la phase créatrice du façonnage des masques.
Notre projet est également d’en donner un aux patients. Avec une première mise en scène à leur actif, nous avons pu observer un développement de leur curiosité, de la rigueur dans leur travail, il a stimulé leur disponibilité et le lien social mis à mal par leurs différentes pathologies. Le bouche à oreille a étendu le nombre de nos patients car ils contribuent toujours à mobiliser leurs propres ressources et leurs donnent des élans de vie.

C’est enfin et encore un mouvement d’ouverture vers l’extérieur. Nos répétitions ont lieu en dehors de l’hôpital dans une salle mise à disposition par la mairie du 11ème. Le Théâtre du Val d’Osne par le biais de son Sénateur-Maire ouvre son espace pour plusieurs représentations du spectacle en décembre 2017. Le Studio-Théâtre de Charenton dont Bruno Bernardin dirige la programmation artistique invite les participants à un parcours culturel. Pour mettre en parallèle le travail, l’accès aux représentations leur est ouvert avec un choix adéquat de spectacles. Nous nous déplacerons dans d’autres théâtres (Maison des Métallos ou Cartoucherie) pour ouvrir encore sur d’autres propositions artistiques.

                   VIDÉO 1                
                   VIDÉO 2                 

Restitution du travail artistique de la Compagnie Les Apicoles* avec un groupe de patients et soignants des Hôpitaux de Saint Maurice. Projet soutenu par la DRAC IDF, l’ARS La manufacture, le Théâtre du Val d’Osne et les Villes de Paris et Saint Maurice. Merci à tous ceux qui ont contribué , et particulièrement à Laurence et Julien à qui nous devons ces images.

 

ATELIER 2016 : Initiation à l’art du clown

Quisaitout et Grobêta de Coline Serreau

« Savoir ou ne pas savoir ? Il y a ceux qui cherchent, qui savent ou qui croient savoir … »

« Quisaitout et Grobêta » de Coline Serreau est un conte moderne et fantastique, une fable philosophique et étrange pour adulte sur la quête du bonheur éphémère d’aimer et d’être aimé.

Quisaitout et Grobêta, parallèles du clown blanc et de l’Auguste, personnages Beckettiens vivent ensemble sous le même toit. Grobêta est au service de Monsieur Quisaitout. Il subit, sans se plaindre… Leur vie commune est conflictuelle car l’un sait tout ou du moins croit tout savoir et l’autre ne sait rien ou du moins croit ne rien savoir. L’un parle de choses intéressantes comme la bombe et le presse-agrumes qui sont pour lui des manifestations de l’intelligence humaine et l’autre aime le riz au chou et a une idée bien précise là-dessus. Leur quotidien va être bousculé par l’arrivée d’une lettre invitant « Monsieur » Quisaitout au grand bal de la baronne à Stratzanovitch. Le maître et le valet entreprennent alors un voyage initiatique au cours duquel ils vivront de nombreuses aventures. Bien décidé à séduire la Baronne, Quisaitout impose à Grobêta l’apprentissage d’une sérénade. Lorsqu’ils arrivent enfin devant le château, la sérénade fait mouche, la Baronne tombe instantanément amoureuse de Grobêta au grand désespoir de Quisaitout…

Quisaitout et Grobêta par un subtil jeu de miroirs nous renvoie à l’Homme. A celui qui en nous cherche à comprendre les choses, gérer, organiser, contrôler, et à celui qui en nous cherche à satisfaire ses besoins premiers. Personnages discursifs, l’un ne peut être sans l’autre et le questionnement de l’un remettra l’autre en question.

Quisaitout et grobêta : intentions

Les désirs de travailler sur ce texte sont multiples.

Le premier intérêt est que la pièce repose sur un duo, duo accompagné de personnages très haut en couleurs. Ce qui a pour but de prolonger la relation soignant-patient en la décalant du rapport traditionnel. En effet, les futurs acteurs partageront ensemble la scène. L’aspect relationnel de la pratique médicale restant complexe et source de difficultés pour certains médecins ou patients, nous utiliserons ce duo pour l’approcher d’une façon nouvelle.

Le deuxième intérêt est d’aborder le travail du clown. Coline Serreau a écrit et a interprété cette pièce dans une version clownesque. Rappelons que le clown est une approche artistique. Cet art permet d’éprouver du plaisir en développant sa créativité et l’inscrit dans une recherche esthétique. C’est l’expression esthétique du clown ; sa poésie, sa spontanéité, la beauté de ses émotions et de l’humanité mise en jeu qui lui donne de la profondeur.

Tout au long des séances, nous allierons l’objectif d’une représentation finale à un travail de construction de son propre clown. Ce personnage comique, n’est plus uniquement un personnage de spectacle, il devient aussi un état d’être, pour les futurs artistes un outil d’apprentissage sur la découverte de soi, l‘authenticité et l’expression personnelle. Il permettra de développer leur écoute et leurs capacités sensorielles et émotionnelles. Sur scène, le clown doit apprendre également à s’accepter comme il est, il doit s’assumer, trouver sa place et s’y affirmer. Il permet aussi de prendre du recul et de dédramatiser des situations, il laisse place également à l’humilité, l’auto-dérision et le lâcher prise.

Le clown marque enfin une progression globale de l’estime de soi ce qui suscite beaucoup d’émotions positives aux participants. Ils trouveront dans ce projet un laboratoire de la relation qui viendra solliciter leur présence et leur authenticité, ainsi que leur aptitude à utiliser la communication non-verbale en exercice d’improvisation et textuelle par la pièce elle-même.

L’intérêt final se trouve dans les scènes de groupe écrite par Coline Serreau qui à l’inverse du duo, en fera également un travail choral. Le temps de quelques scènes, tous les participants se retrouveront sur le plateau. Tous ensemble, ils auront un objet artistique à construire qui entraînera une dynamique de groupe à l’origine de la singularité du spectacle qui leur sera proposé.