Chéri Bibi d’après le roman de Gaston Leroux – Création 2010
La Compagnie les Apicoles, menée de main de maître par Bernard Bernardin, nous présente une libre adaptation du roman feuilleton de Gaston Leroux sur les mésaventures de Chéri Bibi, un forçat injustement condamné, en direction du bagne de Cayenne. Rébellion, cannibalisme, romantisme et… fatalité.
Entre grand-guignol, numéros de troubadour et cabaret musical, cette adaptation scénique de Chéri Bibi surprend et séduit par son inventivité. Le traitement tout à fait inédit de cette aventure, grâce à une mise en scène astucieuse et dynamique, permet au récit de prendre une nouvelle dimension. On soulignera donc ici le travail de Bruno Bernardin, qui a entrepris le transfert d’un roman fleuve saupoudré d’action, et même parfois d’horreur, vers une œuvre courte (1h15), rythmée et très singulière. Fumées, lumières et éléments de décor contribuent à créer une ambiance tantôt pesante, presque menaçante, tantôt plus enlevée, l’humour restant omniprésent dans le texte et l’interprétation.
L’interprétation, justement, est l’un des piliers du spectacle. Cinq comédiens et une comédienne interprètent à eux seuls près d’une vingtaine de rôles. Tels des clowns blancs, avec le visage peint, chacun d’eux accumule costumes, accents et argots pour faire vivre une galerie de personnages contrastés : des paysans, des condamnés, un capitaine de navire et son second, une religieuse, deux couples d’aristocrates… Cette distribution affiche une belle unité. La talentueuse jeunesse des comédiens sur scène permet de dégager une fraîcheur bienvenue.
Musicalement, l’œuvre se situe au croisement de la nouvelle scène française à texte et de sonorités plus britaniques… On saluera l’effort et l’originalité d’insérer des morceaux chantés dans ce type de spectacle de théâtre moderne. Une démarche audacieuse, qui apporte un nouvel éclairage des plus intéressants.
Si Chéri Bibi, de la Compagnie les Apicoles, n’est pas forcément une œuvre facile d’accès, elle revêt pourtant la forme d’un divertissement très bien ficelé et bourré de talent. Une bien curieuse découverte à recommander aux amoureux de théâtre et d’aventure rétro.
Chéri Bibi, de Bruno Bernardin
D’après Les Cages Flottantes de Gaston Leroux
Jusqu’au 30 décembre 2011, à 20h30
Adaptation, mise en scène et scénographie : Bruno Bernardin Création musicale : Tristan Maurel-Delhome et François Marnier Costumes : Marie Maurel
Avec : Caterina Barone, Olivier Bonnaux, Maxime Coudour, Nicolas Gatulle-Duprat, Arthur Leparc et Jean-Jacques Marnier
Chambre 108 de Gerald Aubert – Création 2013
CHAMBRE 108 |
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Théâtre des 2 Rives (Petit t2r) Avant même que la pièce ne commence, le ton est donné avec une épigraphe de Sartre expliquant la véritable signification de sa formule « l’enfer c’est les autres » : ce qu’il a voulu dire c’est que « si les rapports avec autrui sont tordus, viciés, alors l’autre ne peut être que l’enfer ». En effet, on pourrait croire que nous ne sommes pas loin de l’enfer dans le huis clos contemporain de la chambre d’hôpital. Celle-ci va pourtant devenir, non sans difficultés, au gré des humeurs des deux occupants, le lieu où les langues se délient et les émotions se dévoilent. D’une part, René Bertillon, vieil homme aigri et solitaire mais qui a fait de l’hôpital son nouveau domicile, regarde défiler les patients sur le lit voisin. D’autre part, Charles Renoir, la quarantaine, marié, cadre, peu loquace, se retrouve assommé par la suspicion d’un cancer du pancréas qui l’oblige à se livrer à une batterie d’examens. Entre ces deux hommes, une infirmière pimpante, séduisante et pêchue, interprétée avec énergie par Isabelle Rougerie, dont les paroles et les gestes rassurent, mais dont le discours est parfois si maladroit qu’il prête à rire. À force de voir défiler les malades, sans doute la souffrance se banalise… « Quel plaisir de voir un malade jeune ! » lance-t-elle à l’arrivée de Renoir. La mise en scène sobre laisse toute son importance aux mots : les deux lits se meuvent – sur d’agréables morceaux jazzy – au gré des scènes qui correspondent aux temps forts d’une journée à l’hôpital (repas, sieste, nuit). Le lit de l’un est tantôt en avant ou en retrait, privilégiant ainsi les paroles et les maux de chacun, ou bien les deux se retrouvent côte à côte, au même niveau. Au même niveau, puisqu’à partir du moment où Renoir s’installe et enfile un pyjama identique à celui de Bertillon, le jeune n’a plus l’ascendant sur le vieillard et la perte de dignité et d’humanité s’accroît. La pulsion de mort est d’autant plus forte que la chambre 108 donne sur un cimetière, comme si elle en était l’antichambre, et c’est cette angoisse qui sera le moteur de la discussion houleuse et à contretemps des deux hommes. Les deux personnages mettent du temps non pas à parler, mais à se parler. Le René Bertillon interprété par Hervé Masquelier – fort convaincant dans le rôle du grognon – agace Renoir mais aussi le public par ses gémissements et ses plaintes concernant la société en général. Renoir campé par Jean-David Stepler amuse les spectateurs de tous les âges qui rient à ses réparties tranchantes et bien trouvées mais peut aussi être touchant et mettre le doigt là où cela fait mal, chez ses compagnons de scène comme chez les spectateurs. Finalement, tant bien que mal, les deux hommes se radoucissent, un peu résignés par leur « condition de patient » : se rebellant contre celle-ci et s’appelant enfin par leurs prénoms, la communication devient possible. Les problématiques de la pièce font forcément écho chez le spectateur : la famille, l’amour, le désir, la maladie, la solitude, la perte d’autonomie et la mort sont évoqués, sans tomber dans le cliché, mais au contraire, avec humour, tout en alternant émotion et légèreté. Ivanne Galant – Regarts.org
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Le jardinier de la mer rouge de Gérald Duchemin & Rémy Jousse – Création 2014
Dossier de présentation: dossier présentation le jardinier de la mer rouge
Revue de presse: REVUE DE PRESSE Le Jardinier